Une attaque tous azimuts : le président de la République piétine l’ESR, la démocratie et les institutions Imprimer

Dans son discours du 7 décembre 2023 à l’occasion de l’installation du « Comité présidentiel de la science » (voir l'intégralité de l’intervention ICI), Emmanuel Macron a dévoilé un véritable plan de mise au pas du monde de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Il s’agit d’une attaque tous azimuts : plus de ressources pour les « meilleurs », fermeture des unités qui ne répondent pas aux objectifs « d'excellence », accentuation des politiques de différenciation de sites, généralisation des chaires de professeur·es juniors (CPJ) « parce que ça marche », accroissement de l’autonomie des universités et augmentation du volume des contrats d’objectifs, de moyens et de performance (COMP), pilotage de la recherche par le président de la République via les opérateurs de recherche, etc.

 

Sans aucune vergogne, et partant du constat d’une situation qu’il a lui-même contribué à aggraver, quand il ne l’a pas créée, il somme notre communauté d’utiliser « l’esprit de la recherche » (sic) pour s’auto-réformer librement en visant toutefois un objectif défini par lui-même. Il affirme avec aplomb et cynisme que « les statuts ne sont pas des protections, (qu’)ils sont devenus des éléments de complexité » et termine en lançant à l’assemblée : « je vous invite à les changer vous-mêmes » ! Par cette invitation à casser les statuts des personnels de la recherche – enseignants-chercheurs et chercheurs –, le président de la République engage à accentuer l’entreprise de précarisation des métiers, d’alourdissement des tâches, de mise en concurrence et de creusement des inégalités. Il revendique la caporalisation des personnels par le développement des pouvoirs des chefs d’établissement au détriment des libertés académiques, ce qui aura notamment potentiellement pour effet de multiplier les situations de violences et de harcèlement de toute nature.

Avec arrogance et mépris, il provoque frontalement les fonctionnaires de l’ESR et piétine de manière inédite les institutions publiques. Alors qu’il devrait être le garant du service public et non son destructeur, il cherche délibérément le clivage, escomptant la division pour parvenir à ses fins.

Plus grave encore, il encourage le contournement de la loi et des institutions ! Le président de la République peut-il en effet feindre d’ignorer l’existence du Code général de la fonction publique? Il ne lui appartient pas – pas plus qu’aux présidents d’universités –, de modifier le droit de la fonction publique à sa guise. Outre le caractère illégal de sa proposition, il balaie les principes de la République qui reposent sur la démocratie où « la volonté générale » s’impose à celle de quelques-uns ou d’un seul, fût-il le premier personnage de l’État. Il encourage ainsi un aréopage de spectateurs complices à déroger au droit et aux statuts, se proposant même de les soutenir. Par ailleurs, oublieux de ce que la ministre de l’ESR est, constitutionnellement, la représentante de l'État pour ce qui concerne son ministère, il se permet, non seulement de railler ses positions, en mettant les rieurs de son côté, mais encore de rendre public des éléments réputés confidentiels : aucune limite donc au mépris vis-à-vis des institutions et des personnes.

Construisant un discours prospectif définissant selon lui de grands enjeux, il fixe en réalité des objectifs à courte vue dont la mise en œuvre implique la liquidation des institutions de l’ESR. Obnubilé  par ses visées néo-libérales, dans une période où les idées de l'extrême-droite se diffusent et s’enracinent, où seule la volonté du plus fort semble devoir primer, Emmanuel Macron encourage le risque d’obérer durablement la capacité de recherche de notre pays et son développement.

Nous ne resterons pas silencieux face à des attaques sans précédent contre l’ESR et ses personnels révélatrices d’une volonté de réduire à peau de chagrin le service public, notamment celui de l’enseignement supérieur et de la recherche. Le SNESUP-FSU rappelle solennellement que ce n’est pas à cette République-là que nous aspirons, ce n’est pas de cet ESR-là que nous voulons et dont la France a besoin !